Elle restaure un tableau du Musée de La Roche-sur-Yon

Elle la couve encore du regard. L’effleure de ses doigts. Entre Fanny Herr et l’œuvre Nos filles, un fil ténu. « Un face-à-face de 460 heures », sourit la restauratrice. Des mois à scruter les matériaux. À les analyser. « J’ai cherché à comprendre ce qui lui était arrivé, à ce tableau. » Elle a gratté sous le vernis. Traqué les altérations. Saisi bâtonnets, compresses et scalpels, l’œil dans le microscope.

Redonner son éclat à l’œuvre d’Amélie Beaury-Saurel, c’était le défi de Fanny. « Le sujet de mon mémoire de diplôme de restaurateur du patrimoine », appuie l’élève de l’Institut national du patrimoine. Un sujet soufflé par le Musée de La Roche-sur-Yon à celle qui a grandi dans sa ville. « Le tableau est dans nos collections depuis 1905, rappelle Anne-Lise Auffret, chargée des collections. Un an auparavant, Amélie Beaury-Saurel présente Nos filles au Salon des artistes français. Le tableau est racheté par la famille Rothschild, qui en fait don à la Ville de La Roche-sur-Yon. »

« L’histoire du tableau m’a passionnée »

Quand Fanny Herr croise le regard « de la jeune femme à l’allure androgyne » pour la première fois, elle mesure l’ampleur du travail. « Restaurée par le passé, la toile était marouflée sur un carton qui gondolait. Le vernis jauni, les déchirures, les repeints à l’huile… l’état de présentation était très mauvais. » Sous la couche technique, la restauratrice découvre l’histoire de l’œuvre. « Et cela m’a passionnée ! » Devant elle, se révèle la femme nouvelle affranchie des carcans traditionnels.

Avec son expertise Fanny Herr a révélé Nos filles. Redonné ses couleurs pour « les 100 prochaines années. » Elle la regarde dans les yeux, accrochée aux cimaises du musée yonnais. « Dans cette ancienne école Malraux qu’a fréquentée ma sœur… » Sur ses bancs d’écolières, Fanny, elle, rêvait de mêler sciences et art, ses « deux passions. » Aujourd’hui, elle ausculte et soigne « des chefs d’œuvre. »